• Comme beaucoup de gens je suppose, je suis actuellement inquiet du fait de la prolifération des actes terroristes imputés à des islamistes radicaux dans le monde, prolifération doublée d'un retour vers le religieux qui augure de conflits invraisemblables, y compris sur notre sol. Cette inquiétude est renforcée par la sensation qu'un être irremplaçable s'est envolé en 2001. Il existe dans l'Histoire des tournants impossibles à contrebalancer : le 11 septembre, le monde a commémoré le tragique attentat de New York en 2001 qui a marqué un virage irréversible de la géopolitique. 2 jours plus tôt, les afghans ont également commémoré l'assassinat de Massoud par les Talibans, tragique événement également irréversible... Putain de semaine !

     

    Du coup je repense à la formidable occasion manquée par le monde occidental de changer le cours de l'Histoire. En effet que se serait-il passé si, par exemple, Chirac et Jospin avaient reçu le « lion du Panshir » au printemps 2001 lors de sa première visite en Europe au lieu de le bouder et de se contenter d'un entretien avec Hubert Védrine, au Quai d'Orsay je crois, puis avec Nicole Fontaine dans une salle du Parlement Européen? Il est possible qu'ils aient été convaincus par Massoud de l'urgente nécessité de ne plus tolérer les dérives talibanes? Les discours ont certes un peu suivi, mais mollement, en France comme ailleurs... les Talibans ont donc pu continuer à oppresser en toute impunité le peuple afghan...Bien que Massoud ait mis en garde la communauté internationale sur la situation et le gouvernement américain en particulier sur l'imminence d'une attaque de Ben Laden de grande ampleur,  entre avril et septembre ni les américains ni les français ni d'autres n'ont efficacement soutenu l'Alliance du Nord, seul rempart pourtant contre les Talibans cerveau-lavés dans les madrasas pakistanaises...  N'a-t-on pas privilégié nos contrats commerciaux régionaux (armements++)  et une inertie bien confortable plutôt que l'exercice de relations et d'influences géopolitiques fortes dans cette région avec un soutien massif à l'Alliance du nord, martyrisée par les Fous d'Allah?

     

    Massoud était un homme très cultivé, modéré, tolérant et luttant farouchement contre la dérive radicale des Talibans, dérive comparable aux manipulations des nazis et de certaines sectes. Au lieu de le soutenir en bloc, nous (les occidentaux en général) avons donc toléré à l'époque le rôle délétaire  des radicaux pakistanais, voire jordaniens tout en fermant les yeux sur l'endoctrinement massif perpétré dans ces pays et en Afghanistan, conséquence directe du blanc-seing accordé aux milices islamistes pour contrer les soviets dans les années 80. Résultat, une explosion terroriste non anticipée, puis non jugulée par le démantèlement des Talibans, métastasant partout dans la haine, utilisant internet parfaitement pour influer et propager... Sans oublier le rôle incendiaire de l'attaque américano-anglaise en Irak qui a mis un pays à plat en quelques semaines en s'appuyant sur des mensonges et des bombes grossiers,...

     

     

     

    La France a donc, à mon avis bien sûr, perdu l'occasion d'apporter une contribution significative aux équilibres géopolitiques mondiaux en ne soutenant pas davantage Massoud et son combat contre les Talibans. Certes, notre pays est plutôt tolérant et humaniste (enfin si on le regarde de pas trop près...) et il a réagit lorsque les américains s'apprêtaient à attaquer l'Irak. Mais cette réaction était tardive (des dizaines de milliers de Gi's étaient déjà massés au Koweit pour attaquer l'Irak quand Chirac et Villepin se sont insurgés), intransigeante ("de toute façon nous c'est veto") et sans remise en cause  d'une politique de ventes d'armes peu regardante (nous sommes le 3ème exportateur mondial). Par ailleurs nous avions passé des contrats juteux malgré l'embargo avec l'Irak de Saddam sans essayer de favoriser la résistance irakienne, qui aurait pu, qui sait, renverser Saddam autrement qu'à la traîne d'américains naïfs sur les enjeux et les conséquences de leurs actes.

     

    Cependant l'incertitude qui perdure ce jour sur l'avenir de la bien fragile néo-démocratie irakienne, ainsi que le constat du chaos actuel avec ses milliers de civils assasinés par d'autres humains endoctrinés au point de se tuer, portent peut-être les germes d'une critique constructive du passé suivie d'une véritable refonte de notre approche : si la Constitution irakienne est adoptée en octobre, logiquement le transfert de pouvoir devrait s'accélérer et les troupes de la coalition commencer à se retirer, éclaircissant la situation (de quelle façon...? on veera bien...) et donc nous encourageant à rejeter beaucoup plus systématiquement et fermement un islamisme radical qui serait plus transparent en tentant toujours de pourrir l'Irak... (actuellement il est difficile de tout comprendre, entre les disciples de Zarqaoui, les anciens baassistes, le rôle syrien, jordanien, iranien, pakistanais... quel bazar...). De plus l'évacuation de Gaza, bien que chaotique, représente un pas vers la résolution du conflit israelo-palestinien qui empoisonne également les relations internationales depuis trop longtemps : une résolution « propre » de ce conflit couperait l'herbe sous les pieds des endoctrineurs d'Al Qaida qui lavent le cerveau de leurs futurs kamikazes en rendant Israël et « les croisés » responsables de tous les maux..

     

     

     

    La France pourrait donc à nouveau prendre des positions fortes (partagées avec un pouvoir démocrate US, rêvons...) contre l'islamisme radical internationalisé et intolérant... Une meilleure gestion de la question de l'immigration et des cultes en France  avec une pratique religieuse restant privée dans notre pays nous permettraient peut-être d'être plus influents ailleurs... En effet on nous entend beaucoup sur Kyoto, la taxe Tobin et ses variantes, ou encore l'aide au développement (bien que paradoxalement nous nous arqueboutions sur nos subventions agricoles...)...tout comme avant 2003 on nous entendait encore beaucoup sur le problème palestinien... Mais depuis l'invasion et l'occupation de l'Irak, nous (en l'occurrence, nos dirigeants) sommes bien plus timorés ou inaudibles, tout en multipliant les maladresses et erreurs sur le plan intérieur... Le retour de Villepin cette semaine à l'Onu est peut-être un premier pas vers un retour possible de notre influence.

     

    Au niveau intérieur, le gouvernement patauge, tiraillé entre plusieurs options, mais, par exemple, le CFCM a montré à l'occasion de l'affaire des otages en Irak qu'il était capable de parler d'une seule voix, celle de musulmans (croyants) en France respectant la démocratie et la laïcité de l'Etat... et cette attitude pourrait montrer aux populations arabes déstabilisées par le terrorisme qu'il est certainement possible de vivre un islam modéré avec fierté et cohésion, malgré la présence d'extrémistes qu'il faut arriver à cerner et emprisonner.. Du coup si nous optons pour des positions claires, transparentes et justes (ok je rêve, en fait ils doivent surtout voir nos charters sarkoziens mais bon, imaginons...) la voix de la France serait peut-être davantage écoutée, à condition de ne pas retomber dans des contradictions (par exemple en fermant les yeux sur de nouvelles dérives intégristes, chez nous ou ailleurs..) ou de ne pas ignorer un nouveau Massoud... Ce dernier est malheureusement mort suite à un attentat d'une lâcheté immense, mais j'espère que le monde écoutera davantage à l'avenir les quelques personnages de son ampleur, comme Mandela, le Dalai Lama ou encore, à un niveau différent et français, Nicolas Hulot par exemple, qui prêche dans le désert ou presque... Notre monde est en pleine interrogation (religion ou athéisme, ultra-libéralisme ou social-libéralisme, interventionnisme étatique ou non, libéralisation du nucléaire pour tous ou non, pétrole, Europe, espace, etc.), nos dirigeants semblent souvent déconnectés, aussi les personalités apolitiques et influentes ont peut-être leur mot à dire...?

     

     

     

    En conclusion, je sais bien que le bordel actuel est loin d'être résolu voire résolvable, mais j'ai quand même encore envie de rêvasser, aussi je repense souvent à Massoud et espère voir bientôt un leader ou un mouvement mondial se dresser contre les absurdités du monde d'aujourd'hui et de demain... avec une solution bien sûr, c'est bien ça le problème...

     

     

     

    Voici l'extrait d'un article sur la visite de Massoud au Parlement européen en avril 2001, trouvé sur le net (cliquez ici) :

     


    S'exprimant en dari, le Commandant Massoud, coiffé d'un pakul traditionnel, a affirmé que cette invitation serait « appréciée par les Afghans » et considérée comme « le tournant du conflit », qu'elle donnerait à l'Afghanistan une nouvelle image au sein de la communauté internationale ; il exprime sa gratitude à l'égard du Parlement Européen car une nouvelle phase est en passe de s'ouvrir dans la situation en Afghanistan. Le Commandant Massoud estime que les Taliban ont une « interprétation spécifique et fausse de l'Islam ». Leurs motivations sont « exclusivement religieuses », l'Afghanistan ne constituant à leurs yeux que « la première étape » de la poussée dans la région d'un courant intégriste sans précédent. Il a de plus affirmé que « sans l'aide du Pakistan, le régime taliban ne serait pas en mesure de tenir plus d'un an », car bien plus qu'une aide militaire, il s'agit bien d' « un véritable soutien politique, logistique et économique de la part d'Islamabad ». C'est pourquoi des pressions internationales sur le Pakistan sont indispensables pour que ce dernier cesse son soutien au régime extrémiste des taliban au pouvoir ; Nicole Fontaine s'est jointe à cette requête en demandant « solennellement au Pakistan de cesser son soutien à ce régime qui, en raison de son fanatisme, est une menace pour la société internationale ».

     

    Et une vidéo de YouTube qui date probablement de la même visite, où Massoud appelle Bush et les pays occidentaux à agir contre le Pakistan et les talibans avant qu'il ne soit trop tard... :


    Comme quoi, les mots sont utiles, mais s'ils ne sont pas suivis d'actes.... 

     

      

     

    NB : un DVD sur Massoud, Massoud l'Afghan, a été réalisé par Christophe de Ponfilly (interview de fin 2001 : cliquez ici), si vous ne l'avez pas vu et que vous pouvez vous le procurer, n'hésitez pas, ce documentaire est magnifique.... Christophe de Ponfilly est à nouveau en Afghanistan actuellement pour tourner un film sur l'invasion soviétique des années 80, prélude de tout le bazar actuel...

     

     

    Source de l'image : cliquez ici


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